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Compte-rendu *Arqueología mexicana*; edición especial 75

À la lecture de ce dernier hors-série de la revue co-éditée par l'INAH et Raíces, on se serait tenté de dire "Encore les Aztèques ?" ou "Que va-t-on apprendre de nouveau ? On sait déjà tout ?". Or les choses ne sont pas aussi simples. Certes, si vous avez entre vos mains toutes les publications importantes des quinze dernières années rédigées par Miguel León-Portilla, Alfredo López Austin, Leonardo López Luján ou Eduardo Matos Moctezuma, il est évident que ce numéro ne vous apportera pas beaucoup de nouveautés. Pourtant notre visition de la culture aztèque est pour le moins biaisée. Les matériels archéologiques le plus souvent mis en valeur dans les médias et les musées sont des biens somptuaires, extraits d'offrandes de grande importance et liés à une toute partie de la population. Qu'en était-il du "commun" ? Qu'en était-il de la vie de quartier ? Qu'en était-il de la vie du petit fermier et de sa famille qui construit et cultive ses *chinampas* ? C'est justement à cela que prétend ce hors-série.




En introduction Enrique Vela égraine volontiers les publications pléthoriques de ces spécialistes, laissant deviner que nous aurons plus affaire à une compilation d'informations et d'interprétations.

En préambule à cette double perspective, Vela nous propose une petite série de vignettes, tableaux et cartes pour présenter le contexte géographique, historique, social (privilèges et devoirs des *macehualtin* et des *pipiltin*), économique (tribut, commerce, moyens d'échanges), juridique (fonction du *calpulli*, magistrats et cours), économique et religieux (panthéon, prêtrise, calendriers, principaux rites, fêtes des vingtaines) adopté et modifié par les Aztèques. Ce format de vignettes a l'avantage d'aller à l'essentiel, invitant cependant le lecteur à consulter la bibliographie: 

On trouve deux grands axes à ce hors-série : le cycle de la vie et la vie quotidienne. Le premier est lui-même divisé en huit moments. En ce qui concerne la grossesse et la naissance, Vela résume et commente plusieurs chapitres du livre VI de la *Historia general de las cosas de Nueva España* de Sahagún où il est question de l'annonce ritualisée de la grossesse, le choix de la sagesse qui l'accompagnera peu de temps avant l'accouchement et l'accouchement proprement dit. L'archéologue mexicain cite *in extenso* les chapitres XXVII et XXVIII de la même source au moment d'évoquer le "baptême", tant en matière de préparatifs que du lavement, de l'offrande du nouveau-né ou de l'imposition de son nom calendaire. L'éducation aztèque était un subtile mélange de pragmatisme et de spiritualité qui s'acquérait principalement au sein de la famille. Les taches étaient assignées selon leur sexe et les comportements inadéquats pouvaient être sévèrement punis, comme l'indique le *Codex Mendoza*. À cette éducation informelle s'ajoutait un enseignement formel des jeunes garçons au *techpolcalli* ou au *calmecac*, selon leur condition sociale, et au *cuicacalli*. Certaines jeunes filles pouvaient également entrer au service du temple jusqu'à leur mariage. En ce qui concernene le mariage, c'est là encore le livre VI de l'ouvrage de Sahagún qui nous est proposé comme référence pour comprendre l'âge du mariage, le choix de la fiancée idéale pour le jeune homme, les préparatifs, la cérémonie de la noce et du lien et les quatre jours qui la suivaient. Laissant de côté tout ce qui concerne la vie adulte, Vela en vient directement à une courte présentation de la conception de la mort selon les Aztèques et s'intéresse aux principaux au-delà aztèque que sont le *Mictlan*, le *Tlalocan*, le *Chichihuacuahco* ou le Ciel du Soleil avant d'ébaucher les pratiques funéraires qui sont pourtant d'une grande variété et complexité.

Le deuxième axe de ce hors-série nous propose une reconstitution hypothétique d'une journée de *macehualli*. L'information proposée est rapportée sur différentes notes : la première série s'interroge sur la maîtrise du temps et la maintenance du foyer. Puis viennent les observations sur l'importance des canoés, autant pour se déplacer que pour obtenir les matières primaires. En ce qui concerne l'hygiène publique et personnelle, Vela explique leurs particularités, surprenantes aux yeux des Espagnols, même si Tenochtitlan est une ville où les bruits et les odeurs se mélangeaient, créant une ambiance unique. Se déplacer en ville ou sur les canaux impliquait des salutations et des gestes de politesse qui peuvent nous paraître étonnantes. À l'opposé il n'était pas rare d'assister à certaines incivilités ou d'entendre certaines noms d'oiseaux voler. Impossible d'ignorer non plus les plaintes des familles qui pleurent la perte d'un proche ou le rire des joueurs de *patolli*. Un autre aspect essentiel de la vie quotidienne est le logement : sont présentés ici plusieurs types de maisons, les techniques de construction qui semblent avoir été en vigueur, les activités domestiques et les rares biens domestiques que chaque famille pouvait utiliser. Les vêtements féminins et masculins sont ensuite indiqués brièvement, les ornements corporels (souvent réservés à l'élite), Les accessoires sont en revanche laissés de côté. Les activités professionnelles apparaissent sur une simple page, reprenant principalement la classification proposée par Sahagún. Thème central de toute civilisation, l'alimentation des Mexicas apparaît sur une double page, prenant autant en compte le passé de chasseur-cueilleur des Mexicas comme leur sédentarisation, liée principalement à la culture du maïs et à ses multiples préparations. Une troisième revient sur les ustensiles de cuisine, les heures de repas, les bonnes manière à table. Un dernier aspect, trop souvent négligé au moment de parler de la vie quotidienne, ferme cette ample dossier : Vela referme en effet sa réflexion sur la nuit et les craintes variés qu'en avait les anciens Mexicas.

Il n'est de bon texte de divulgation sans de bonnes illustrations. À ce titre, si la présence d'images extraites du texte de Sahagún est nécessaire, les interprétations artistiques modernes d'Alberto Beltrán et de Guillermo de Gante offrent une approche visuelle innovante.

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